
Salon du Bourget : pour une stratégie européenne du spatial
Le 55e Salon international de l’aéronautique et de l’espace qui s’est tenu au Bourget, près de Paris, du 16 au 22 juin 2025, a été le lieu de différentes annonces à portée essentiellement européenne. Parmi ces annonces que relève le Centre national d’études spatiales (CNES) : la coopération des agences spatiales allemande et française, la première mission de la spationaute française, l’annonce des lauréats de l’accélérateur européen de startups SpaceFounders ou encore la feuille de route de décarbonation de la filière spatiale française. Autant d’annonces, saluées par le Président de la République française qui a souligné, lors de sa visite sur le salon, l’importance pour la France et pour l’Europe d’innover et de développer leurs capacités souveraines dans le domaine spatial.
Devenu le premier rendez-vous de l'industrie aéronautique mondiale, le Salon international de l'aéronautique et de l'espace de Paris - Le Bourget (SIAE) constitue l’une des plus importantes manifestations de présentation de matériels aéronautiques et spatiaux. Né au tout début du XXe siècle, le SIAE a accueilli cette année plus de 305 000 visiteurs et a bénéficié d’une forte affluence des professionnels du secteur qui se sont retrouvés autour des dernières innovations en matière d’aéronautique et de spatial.
À ce titre, le Centre national d’études spatiales, qui a assuré une forte présence sur place, a fait cette année la part belle à la thématique spatiale en organisant le Paris Space Hub, un hall entièrement consacré à l’espace qui rassemblait les principaux acteurs du spatial français et européen, à proximité des maquettes géantes d'Ariane 1 et d’Ariane 5.
Pour une stratégie spatiale française et européenne
La plupart des projets présentés lors du salon ont une portée européenne. C’est d’ailleurs cet aspect que le Président de la République française a souligné dans son discours sur le site du salon du Bourget. Evoquant « un contexte international fait de menaces », le Président a souligné l’importance pour la France et pour l’Europe d’innover et de développer leurs « capacités souveraines dans le domaine spatial ».
Selon le CNES qui rapporte ces propos, Emmanuel Macron « a exhorté l'Europe à mener une « reconquête à marche forcée dans le domaine du spatial, sur fond de concurrence grandissante des géants américains et chinois, et une forte dépendance aux constellations de SpaceX ». Il a également souhaité que « l’Union européenne se donne les moyens de devenir une puissance spatiale ».
C’est encore cette volonté européenne que le Président a notamment soulignée lors de son échange par visioconférence avec l’astronaute française Sophie Adenot, actuellement en entraînement avec la NASA aux Etats-Unis. La première mission de la spationaute française à bord de la Station spatiale internationale, qui doit intervenir au printemps 2026, a désormais un nom : εpsilon.
Le nom de la mission et « son écusson » ont en effet été annoncés au Salon du Bourget. Au cours de cette mission, Sophie Adenot mènera à bord de l’ISS de « nombreuses expériences scientifiques, technologiques et éducatives » portées par le CNES et la communauté spatiale française, « contribuant à la recherche scientifique et inspirant les jeunes générations ».
L’Europe, moteur essentiel des projets
Au-delà de sa présence sur le salon, le CNES a également participé à plusieurs temps forts qui ont donné lieu à différentes annonces. Parmi celles-ci :
- Le renforcement des agences spatiales allemande et française, notamment dans la mise en place de plusieurs projets communs dans le champ des « technologies critiques et des technologies de rupture, au service de la souveraineté spatiale européenne ». L’Allemagne, qui était l’invitée d’honneur du CNES au Salon du Bourget, a affirmé sa volonté d’avancer sur ces projets d’envergure dans le domaine spatial. Les deux pays sont en effet les deux premiers partenaires européens dans le domaine de l’espace. Trois nouvelles missions ont ainsi été annoncées : une mission d’exploration japonaise qui décollera pour les lunes de Mars en 2026, avec un nouveau petit rover, Idefix, qui jouera le rôle d’éclaireur, une mission d’observation de la Terre, Merlin, qui s’intéressera à la « concentration en méthane atmosphérique » et dont le lancement est prévu en 2028. Enfin, un démonstrateur de « lanceur réutilisable », le projet Callisto, dont le premier vol d’essai est prévu en 2026 ;
- Un projet de moteur réutilisable à très forte poussée européen. Ce programme, dénommé ASTRE, s'apprête à « propulser les fusées européennes vers les étoiles ». Cette initiative ambitieuse a pour but de « révolutionner la propulsion spatiale européenne pour répondre aux besoins futurs des lancements lourds et des missions d’exploration spatiale ». Ce nouveau moteur va doter l’industrie spatiale française et européenne de nouvelles compétences pour des applications stratégiques.
Des startups accompagnées au niveau français et européen
Autre projet européen, l’accélérateur européen de startups SpaceFounders, qui a dévoilé ses lauréats lors du salon du Bourget. SpaceFounders, précise le CNES, est un « programme d'accélération européen pour les startups du spatial, ouvert aux meilleures entrepreneuses et entrepreneurs européens (incluant l'Angleterre et la Suisse) ».
Dans l’écosystème spatial européen, l’annonce des lauréats de cette 6e promotion était en effet très attendue : la sélection comprend 15 startups, dont quatre françaises, qui vont être accompagnées dans leur croissance. L’accompagnement se déroulera de septembre à décembre, en présentiel et en virtuel, dans trois villes européennes spécialisées dans le spatial : Toulouse, Munich et Turin.
Les lauréats sélectionnés développent tous des technologies innovantes pour des usages aussi variés que « la surveillance de l’espace, les prévisions de tremblements de terre ou la fabrication de produits pharmaceutiques dans l’espace ». Au programme de travail pour les 15 startups sélectionnées : structuration de la croissance de l’entreprise, stratégies de financement, visites industrielles et rendez-vous d’affaires en Europe grâce aux partenaires de SpaceFounders.
À noter aussi que les lauréats bénéficieront de l'accès à un réseau d’alumni reliant 70 des meilleures entreprises spatiales en Europe, afin de partager leur expérience, nouer des relations commerciales, échanger avec des « mentors expérimentés issus du monde de l'investissement et de l'industrie spatiale ».
Depuis sa création, souligne encore le CNES, SpaceFounders « aura accompagné 70 entreprises dont 28 françaises ou ayant une filiale en France » et permis 297 millions de levées de fonds, dont 100 millions par des entreprises françaises.
La décarbonation du spatial en marche
La feuille de route de décarbonation de la filière spatiale française, une première mondiale, a également fait l’objet d’une annonce au cours du salon du Bourget. Dès 2023, le ministère de l’économie avait demandé au CNES de piloter l'élaboration d'une feuille de route commune à l'ensemble de l'industrie spatiale française, dans le but de « mesurer l'impact environnemental de la filière à l'échelle nationale et de s'engager dans la réduction de cette empreinte ».
Aucune évaluation rigoureuse de l'empreinte carbone de la filière spatiale n’ayant été menée jusqu’à présent, ce projet constitue ainsi une première mondiale, fruit d'une « collaboration volontaire et constructive entre les acteurs de la filière, reposant sur l'état actuel des connaissances disponibles ».
Cette initiative, ajoute le CNES, s’aligne sur les standards internationaux et « marque le début d'une démarche structurée pour réduire l'empreinte carbone du secteur industriel ». L’ambition est d’atteindre des objectifs significatifs d'ici 2040, avec une vision à long terme pour 2050, « en parfaite adéquation avec les engagements de la France et de l'Union européenne, ainsi qu'avec la Stratégie nationale bas carbone ».
Concrètement, 12 leviers d’actions ont été définis, regroupés en cinq thématiques (énergie, transport, matériaux, procédés, données), chacun étant structuré autour d'une « liste d'actions à mettre en œuvre par l'écosystème, ainsi que des conditions de succès nécessaires à leur réalisation ».
Aucun commentaire
Vous devez être connecté pour laisser un commentaire. Connectez-vous.